Français: Ce livre n’est pas un livre d’histoire. C’est une promenade sincère dans un espace géographique qui constitue ma sphère et mon univers. Un peu cri d’amour, un peu cri au secours, parfois je ne reconnais plus ma ville. Et parfois, au creux d’une rue ou d’un visage, je la retrouve, Beyrouth si particulière, si généreuse. Beyrouth ma douceur, Beyrouth ma douleur, on est nombreux à entretenir avec la ville une relation basée sur des exacerbations. Je t’aime, je te hais, je te quitte, je te retrouve. On pourrait en dire tant sur cette ville qui ne laisse pas indemne. Mais lasse des mythes et des clichés, lasse d’acquiescer quand on me parle de phénix et d’une ville qui renaît de ses cendres, j’ai envie de demander que l’on arrête de détruire ma ville. Je ne veux plus qu’elle meure et qu’elle ressuscite. Je ne veux plus qu’on la qualifie et qu’on l’enferme dans des appellations qui ne lui font pas du bien.
Vivre à Beyrouth ne suffit pas. Il faut vivre la ville, marcher dans ses rues, arpenter ses artères, parler avec ses habitants, se rappeler l’histoire, serrer dans ses bras ce qui reste, prendre conscience de l’urgence de mettre en lumière les édifices et l’âme. En arabe, quartier se dit ‘hay’ et hay veut aussi dire vivant. Rien n’est plus vivant que chaque quartier de Beyrouth. Chacun a ses particularités, ses ambiances, ses tourments et ses joies. L’Autre habite tout prés, à quelque pas. Et l’Autre est un peu de nous-mêmes. Ce voyage dans cinquante-deux quartiers de ma ville à profondément marqué mon identité beyrouthine. Je n’appartiens à aucune autre ville que celle-là. Beyrouth n’est pas une idée de ville. Beyrouth n’est pas impossible. Beyrouth n’est pas une gageure. Beyrouth existe. Beyrouth se réveille tous les matins avec l’urgence de sa journée. Elle se décline trop souvent au passé dans des trémolos nostalgiques qui font pleurer ceux qui s’accrochent à un hier révolu. Elle se conjugue au futur avec une incertitude qui fait trembler ceux qui n’y croient plus. Mais Beyrouth, dans ce livre, s’inscrit au présent dans un long cri d’amour que je lui offre.
English: This book is not a history book. It is a walk through the geographical space that is my universe. A cry of love, a cry for help; sometimes I do not recognize my city. And sometimes at the corner of a street, in someone’s face, I stumble on thee, Beirut, so generous and unique. Sweet and bitter Beirut. Many of us entertain a love-hate relationship with this city. I love you, I hate you, I’m leaving, I’m coming back. There are so many things to be said about Beirut. But I’m tired of myths and clichés, tired of nodding agreeably when spoken to of the Phoenix, of the city that is reborn from its ashes. I want my city to be saved. I no longer wish for it to die and be reborn. I no longer wish to see it labeled, walled in by harmful denominations.
Living in Beirut isn’t enough. You have to live in Beirut, to walk its streets, travel its highways, speak to its inhabitants, remember its history. hold on the what is left of it in your arms and shed light on its monuments, brings out its soul. In Arabic, the word for neighborhoods is ‘hay’, and hay also means alive. The neighborhoods of Beirut are indeed alive. Each is distinct, with its different moods, troubles, and joys. The constitutive Other lives just a few paces away and the Other is a little bit of ourselves. Traveling through my city’s 52 neighborhoods have left a strong mark on my Beiruti identity. I belong to no other city. Beirut isn’t an idea. It is not impossible. Beirut is not a challenge. Beirut is a being that wakes up every morning and rushes through the day. Those who are hanging on to bygone times speak of it in the past with a tremor in their voice. Those who have lost faith foresee an uncertain and frightening future. But in these pages, Beirut is spoken of in the present, a cry of love; all that I have to offer.