Livre: Liban Lumière des siècles
Liban Lumière des siècles
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Description
LebanonPostcard présente le Livre: Liban Lumière des siècles – Texte Liminaire de Max-Pol Fouchet – Photos Fluvion Roiter. Livre à couveture rigide, 28.3×22.3 cm, 130 pages (Livre usé).
Revenir, longtemps après un premier séjour, dans un lieu qu’on aima, c’est tenter les démons de la mélancolie.
N’y revient-on pas pour vaincre le temps avec un morceau d’espace peut-être inchangé? Hélas! il faut vite reconnaître la puérilité du défi, se détromper. Seule la nature est demeurée ce qu’elle était: voici la mer, la montagne, la plaine. Mais ce qui est de l’homme change. Et de l’homme sont les villes.
Que sera Beyrouth? me demandais-je, vingt ans après une première et unique escale. J’avais le souvenir d’une ville provinciale, voire «coloniale», alanguie dans sa chaleur lente, malgré son légendaire commerce. Dans ma mémoire, la vente et l’achat ne privaient pas le vendeur ni l’acquéreur de «prendre leur temps». Ils négociaient, mais en savourant de minuscules tasses de café, rite tout libanais. Ces tasses, d’ailleurs, vous étaient offertes au premier prétexte, à la moindre rencontre. Elles étaient les points sur les «i» du mot amitié. La densité du café “turc” rappelait, malgré la vie circonstancielle, à l’essence des choses.
Me trompais-je? Il se peut, mais telle était mon image.
Déjà l’avion la contredisait. Avant d’atterrir, nous survolions une cité non plus horizontale, mais verticale, plantée de hauts cubes et de hautes boîtes géométriques. Etait-ce encore Beyrouth, ce hérissement de béton? Allais-je faire mauvais coeur contre la bonne fortune d’une ville? Après tout, me corrigeais-je, voici le signe d’une vie non recluse, d’une prospérité. De ce point de vue, Beyrouth annonce de loin son modernisme. Le Liban, à peine plus vaste que l’île voisine de Chypre, montre ainsi son aptitude à la fortune, à l’expansion hors de ses étroites frontières. Ainsi se manifeste ce génie commercial qu’on n’a jamais cessé de lui reconnaître depuis que les bateaux phéniciens cabotaient au long des rivages de la Méditerranée, sans crainte même de franchir les Colonnes d’Hercule pour chercher l’étain des lointaines et brumeuses Cassitérides.
Certes, je n’ai pas «revisité» Beyrouth les yeux vers les gratte-ciel. On en voit trop de par le monde, peu différents les uns des autres. En général, c’est la tenue de bagnard des villes modernes… Ils n’ont pas poussé ici, semble-t-il, selon un ordre établi. J’aime en cela reconnaître l’un des traits premiers du caractère libanais: son individualisme, à ce point estimable, dans un monde tendu vers le stéréotypé, qu’il fait oublier ses excès, les difficultés qui peuvent en résulter pour l’Etat. Ces architectures, laissons-les. Le Liban est à hauteur d’homme. On doit y regarder les visages, les gens, les gestes. La foule est d’une grande diversité, pour la raison au moins qu’à la population proprement libanaise s’ajoutent, sur cette terre d’accueil et d’asile, des émigrés venus de partout. «… Une petite Europe industrieuse, libre, intelligente surtout…» En ces termes, Gérard de Nerval définissait, dans son Voyage en Orient, le Liban, vers 1843. Aujourd’hui, il faudrait remplacer les trois premiers mots par: «un petit monde», et accorder les adjectifs.
Beyrouth est devenue cité internationale. L’ancien fond pourtant n’a pas disparu.
Naguère, la place des Canons, la plus célèbre de la ville, comme je la connus, me parut un forum d’indolence. On faisait cirer ses chaussures au centre du trottoir, avec sérénité. Des nombreux petits bars sortait parfois un air de flûte, lent comme une couleuvre. Il y avait des fiacres… Aujourd’hui, de massives voitures américaines ou germaniques sont alignées en bordure des trottoirs. Les automobiles coulent à flot. Des «juke-boxes» tonitruent en arabe et en toutes les langues. Des panneaux de plusieurs étages annoncent les programmes des cinémas. Les maisons basses sont dominées par d’immodestes immeubles voisins. La place même s’est agrandie… Mais j’ai retrouvé le café dont on assure qu’il est le plus ancien de la ville. A l’intérieur il abrite toujours des fumeurs de narguilé, et les joueurs invétérés, ceux qui «tapent la carte» à longueur de journée ou méditent devant un jacquet. Aussi longtemps que je verrai des narguilés, une certaine confiance ne me quittera pas. Ces fumeurs ressemblent à l’enfant qui tète. Le tuyau défie le temps, l’empêche de filer comme sur une autoroute. Sa courbe ralentit la vie. Encore un instant de volute, Monsieur le bourreau!… Encore un songe de fumée!
A quelque mètres de la peu martiale place des Canons, le temps marche soudain à reculons. On entre dans les souks. Malgré les transistors criards… …etc (Une partie de l’introduction)
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